Le 25 octobre 2021, RTE (Réseau de Transport de l’Electricité) a publié les principaux enseignements de son étude prospective « Futurs Énergétiques 2050 ».
De quoi parle ce rapport ?
Ce rapport contient une analyse des évolutions de la consommation, et compare les six scénarios de systèmes électriques qui garantissent la sécurité d’approvisionnement, pour que la France dispose d’une électricité bas-carbone en 2050.
18 points clés sont étudiés : ils portent sur la consommation énergétique, la transformation du mix énergétique, et tiennent compte de considérations économiques, technologiques, environnementales. Ils pointent également sur l’urgence pour la France de se mobiliser, et montrent surtout que les objectifs peuvent être atteints à un cout maitrisable.
Quels que soient les scénarios modélisés, les énergies renouvelables, et l’éolien en particulier, apparaissent comme indispensables à l’atteinte des objectifs de la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC). Présentes dans tous les scénarios envisagés, les ENR occuperont, à l’horizon 2050, entre 50 et 100% du mix énergétique français.
Les paramètres pris en compte dans l’étude sont résumés ci-après :
https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-10/BP2050_rapport-complet_chapitre2_cadrage-etude.pdf
Les différents scénarios de mix de production à l’horizon 2050 : Quel que soit le scénario envisagé, l’objectif neutralité carbone ne pourra être atteint uniquement à l’aide du nucléaire. Un déploiement significatif des énergies renouvelables s’impose. Plus d’information ici…
L’éolien terrestre aura sa part dans tous les cas:
Au vu de ces déductions, la place des énergies renouvelables n’est plus à mettre en cause.
Considérations économiques et technologiques :
Les énergies renouvelables électriques sont devenues des solutions compétitives
Le stockage de l’énergie, sous forme hydraulique, de gaz décarbonés comme l’hydrogène, de batteries, devra accompagner le développement des énergies renouvelables.
Dans tous les cas, les réseaux de distribution électrique doivent être urgemment réorganisés et redimensionnés.
Plus la part des ENR sera importante dans le scénario choisi, plus les efforts en termes de stockage et de redimensionnement des réseaux devront être importants.
D’un point de vue technologique, les conséquences du changement climatique (sécheresse, vent plus ou moins fort) doivent être anticipées.
Considérations environnementales :
Le développement des énergies renouvelables soulève un enjeu d’occupation de l’espace.
Il peut s’intensifier, mais doit se poursuivre en s’attachant à la préservation du cadre de vie.
RTE souligne que le développement des ENR ne conduira pas à une artificialisation significative des surfaces, et ne limitera pas les autres usages.
Le développement d’une énergie électrifiée impose d’anticiper des besoins croissants en métaux.
Conclusions plus générales du rapport :
Sur la base des hypothèses de départ du rapport, RTE prévoit que tous les scénarios proposés doivent permettre d’atteindre la neutralité carbone pour la France en 2050. Le cout du système électrique nécessaire sera maitrisable :
- les couts en investissement seront élevés : les estimations impliquent un doublement des investissements dans le système électrique,
- mais par la suite, les couts d’approvisionnement en électricité seront plus faibles qu’en énergie fossile
- le cout de l’énergie sera plus stable car indépendant des cours du gaz fossile et du pétrole
Les investissements nécessiteront néanmoins, quelque soit le scénario choisi, de fortes aides publiques.
Enfin, RTE souligne l’urgence à se mobiliser pour répondre à la crise climatique,
- en réduisant l’empreinte carbone française,
- en développant conjointement une forte efficacité énergétique,
- en conjuguant les deux modes de production d’énergie décarbonée : électricité d’origine non fossile, et bioénergie.
Les délais de développement d’une électricité uniquement nucléaire sont incompatibles avec une réduction rapide des émissions de CO2.
Les analyses approfondies de l’étude future énergétique 2050 seront publiés au premier trimestre 2022, par RTE.
Pour aller plus loin…
…. Comment et pourquoi sortir des énergies fossiles d’ici à 2050 ?
L’objectif premier de ce rapport est de trouver des solutions pour respecter les engagements climatiques de la France, et atteindre la neutralité carbone en 2050.
Constat de départ : 60 % de l’énergie totale utilisée actuellement en France est d’origine fossile (Pétrole, gaz naturel). La France est aujourd’hui dépendante de ces énergies. Atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050 implique donc de se passer de ces énergies fossiles en 30 ans.
Les hypothèses de départ de ce rapport reposent sur une baisse générale de la consommation énergétique française de 40%. Cela ramènerait la France à la consommation d’énergie qu’elle avait à la fin des années 60.
La suppression de la consommation d’énergie fossile sera compensée en grande partie par une hausse de la consommation d’énergie électrique décarbonée, ainsi que par le développement de l’utilisation de la biomasse.
https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-10/BP2050_rapport-complet_chapitre1_obet-etude.pdf
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… Les différents scénarios de mix de production à l’horizon 2050
Quel que soit le scénario envisagé, l’objectif neutralité carbone ne pourra être atteint uniquement à l’aide du nucléaire. Un déploiement significatif des énergies renouvelables s’impose.
RTE envisage 6 différents scénarios de production énergétique à l’horizon 2050. Tous ces scénarios supposent la présence d’énergies renouvelables, du scénario le plus nucléarisé, avec 50 % d’énergies renouvelables, au scénario 100% renouvelable, sans nouvelles constructions nucléaire, ni maintien du nucléaire historique.
La plupart des centrales nucléaires actuelles, même si elles sont maintenues en fonctionnement au-delà de leur durée de vie initialement prévue, seront arrêtées durant la décennie 2040, impliquant un « effet falaise » de baisse brutale de production énergétique, qui devra être compensé. Les nouveaux réacteurs nucléaires, même si leur construction était décidée aujourd’hui, ne pourraient rentrer en service avant 2035, ce qui rendrait impossible le respect des engagements climatiques.
(image issue du rapport RTE)
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… Considérations économiques et technologiques
Les énergies renouvelables électriques sont devenues des solutions compétitives: Les coûts des énergies renouvelables sont aujourd’hui compétitifs, inférieurs à ceux des nouvelles centrales thermiques et nucléaires.
Le stockage de l’énergie, sous forme hydraulique, de gaz décarbonés comme l’hydrogène, de batterie, devra accompagner le développement des énergies renouvelables: Leur variabilité devra être compensée par de la flexibilité :
- meilleure gestion des interconnexions avec les pays voisins, pour lisser au niveau européen les variabilités des productions en ENR, et mutualiser les productions.
- développement de nouvelles capacités de stockage (hydrogène, batteries) en plus du stockage hydraulique historique. Le système devra pouvoir absorber puis déstocker quand nécessaire.
- pilotage de la consommation, et gestion intelligente de la demande : le rôle du numérique pour le pilotage en temps réel sera croissant.
Dans tous les cas, les réseaux de distribution électrique doivent être urgemment réorganisés et redimensionnés: Toute nouvelle installation d’énergie implique un raccordement au réseau local électrique : ces raccordements vont se multiplier. Quel que soit le scénario retenu, des investissements seront nécessaires pour adapter les réseaux de transport (RTE, lignes haute tension), et de distribution (Enedis). Au niveau local, les investissements que devra réaliser Enedis pourront varier du simple au double selon la part d’ENR prévue dans le mix choisi.
Plus la part des ENR sera importante dans le scénario choisi, plus les efforts en termes de stockage et de redimensionnement des réseaux devront être importants.
D’un point de vue technologique, les conséquences du changement climatique (sécheresse, vent plus ou moins fort) doivent être anticipées: Il faudra anticiper :
- Les sécheresses qui pourraient limiter les apports en eaux de refroidissement des centrales nucléaires
- Les périodes de faible vent, quand elles seront concomitantes avec des périodes de forte demande électrique (vagues de froid, certes moins fréquentes, et surtout canicules)
Les capacités de stockage seront alors déterminantes pour pouvoir assurer une continuité du service d’approvisionnement de l’électricité.
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… Considérations environnementales
Le développement des énergies renouvelables soulève un enjeu d’occupation de l’espace. Il peut s’intensifier, mais doit se poursuivre en s’attachant à la préservation du cadre de vie: L’utilisation d’une énergie fossile a habitué les Français à une quasi-invisibilité des systèmes de production et de transport de l’énergie et de leurs impacts directs. Le développement des ENR rend visibles les systèmes de production, et crée la controverse. A noter qu’un mix à haute teneur en installations nucléaires nouvelles ne manquera pas non plus de poser des problèmes d’acceptabilité, mais de façon plus localisée sur le territoire.
RTE souligne que le développement des ENR ne conduira pas à une artificialisation significative des surfaces, et ne limitera pas les autres usages: Même dans le cas d’un scénario 100% renouvelable, les surfaces concernées seront nettement moindres que celles du réseau routier et des zones commerciales. L’agriculture reste largement possible au voisinage des éoliennes ; le pâturage, et certaines cultures sont toujours possibles dans le cas du solaire.
Le développement d’une énergie électrifiée impose d’anticiper des besoins croissants en métaux: L’électrification des usages va amener à des enjeux critiques d’approvisionnement principalement en cuivre (réseaux électriques), mais aussi en cobalt, lithium (développement de la mobilité électrique), et silicium (solaire). Les difficultés d’approvisionnement à anticiper sont liées à la raréfaction et/ou à des considérations géostratégiques quand les métaux sont extraits dans des pays qui en ont le monopole. Des scénarios de sobriété concernant ces ressources vont s’imposer d’eux-mêmes, étant donnée la rareté croissante des matières premières.
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… Dans l’optique du Scénario National Bas Carbone SNBC pour 2050, comment baisser la consommation énergétique française de 40% en 30 ans ? Et qu’impliquerait une politique dite de ‘sobriété énergétique’ ?
L’hypothèse de départ de la stratégie bas carbone française repose largement sur une diminution de la consommation grâce à l’efficacité énergétique :
La diminution progressive de la consommation énergétique des biens d’équipements, des politiques publiques volontaristes de rénovation des bâtiments, et l’électrification de certains usages, comme dans les transports, doivent permettre une baisse globale de la consommation énergétique (le rendement d’une voiture électrique est de 90%, contre environ 30% pour un moteur thermique par exemple). Cette efficacité énergétique permet d’envisager un gain de 200 TWh.
Ainsi, la consommation énergétique globale diminuera, mais dans le même temps, la consommation d’énergie électrique sera en forte hausse, pour substituer l’électricité aux énergies fossiles.
Dans son rapport Futur Energétique 2050, principaux résultats, RTE propose également des effets de baisse de consommation dans le cas d’une mobilisation pour plus de sobriété énergétique. Cela permettrait de gagner 15% supplémentaires. Cette sobriété énergétique implique des changements profonds de mode de vie dans la société. RTE a identifié différents leviers de sobriété, en s’inspirant des travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Le rapport souligne que la sobriété est un scénario en tant que tel, qui doit faire partie du débat public. En effet, la consommation énergétique devra être maîtrisée pour que la transition soit possible.
Le document ci-dessous développe les effets attendus de l’efficacité énergétique, et éventuellement de la sobriété, sur la consommation énergétique française :
Pour autant, une bonne façon de réduire l’empreinte carbone globale française, prenant en compte les émissions importées, devrait impliquer une réindustrialisation du pays. Avec l’électrification des procédés, cela conduirait à une augmentation de la consommation électrique, mais à une baisse de l’empreinte carbone globale.